Un peu plus d’un an après leurs créations en 2009, nos pages facebook rassemblaient 300 000 personnes. 200 pages des villes ont été lancées. Rapidement nous nous sommes rendu compte de l’utilité de rassembler des gens dans des communautés de villes mais les caractéristiques des pages facebook n’étaient pas appropriées. Il fallait autre chose, non pas un canal de communication du ‘haut vers le bas’, mais un lieu de partage où toutes les personnes peuvent se parler entre elles.
Seules les municipalités communiquaient avec leurs chargés de communication et leur “marketing territorial”, et force est de constater que notre présence dérangeait les mairies. En 2013 on cherchait encore à expliquer notre présence, voici notre message de l’époque via cette infographie:
Une mairie nous avait même pris une de nos pages et ses 1000 membres. C’est du passé, mais en regardant cette infographie je pense que l’on ne mettrait que les fans dans le rond bleu maintenant.
En tous cas, à l’époque, il y avait un problème fondamental pour réaliser cet objectif: facebook avait réalisé sa grande purge des groupes. Les groupes avant 2010 pouvait rassembler des centaines de milliers de personnes, on se souvient de “Coyote attrape Bip Bip et lui défonce la gueule”. Facebook avait supprimé tous les membres de ces groupes : dur de miser sur une construction de communauté alors que facebook pouvait tout supprimer d’un coup.
Mais alors que construire un groupe était risqué, la chute du reach des pages nous poussait à aider au développement d’un groupe sur notre plus grande communauté en 2014, celle de Nancy.
Car en 2012 il s’était passé quelque chose de fédérateur : les inondations de Nancy, et celles en Aquitaine, nous avaient montrés combien l’échange et l’entraide sur les réseaux sociaux pouvaient être utiles. Nous sommes fiers d’avoir posté dans ces moments difficiles alors que les municipalités n’avaient pas encore compris le rôle fédérateur des réseaux sociaux en temps de crise. Dans le sud des personnes allaient se rassembler dans des magasins de bricolage qui leurs fournissaient des pelles gratuites. Un artisan qui recherchait sa camionnette volée, un calculateur de polo qui coutait trop cher à réparer, le succès de ces post nous encourageaient à faire du lien social non plus dans des pages mais dans des groupes.
Aujourd’hui 40 groupes ont été lancés, mais ils sont loin d’être les seuls. D’autres communautés ont été créées par d’autres initiatives. Comme par exemple “troc ta plante”. Depuis des années nous faisions une fixation sur le troc de plante : en 2014 nous écrivions ici :
” je veux des plans de muguets sous forme de racine pour l’année prochaine. Ils existent forcément dans les jardins de quelqu’un, près de chez moi, que je ne connais pas: je fais glisser le centre d’intérêt ‘’Le Bon Troc’’ au centre de la carte. Un onglet recherche apparaît et là tous les membres du réseau qui ont des plans de muguet à planter près de chez moi apparaissent : tiens, il y a quelqu’un à 200 mètres. ” Cette communauté existe maintenant depuis juin 2018 et s’est développée dans des dizaines de villes. C’est un projet formidable, mais cela m’amène à préciser ce que nous sommes et notre projet à l’Avrf. Car c’est bien en observant des groupes différents de ville que l’on arrivera à mieux définir notre projet.
Avant tout nous voulons faire du lien social dans les villes. Nous sommes généralistes: notre projet ne se limite pas au troc, à l’entraide mais à tout ce qui touche une ville entière. Dans un groupe de ville voici une liste non exhaustive de ce que l’on peut y trouver:
-des bonnes adresses: garage, médecin, resto …
-trouver un appart au dernier moment,
-retrouver ses clés , sa CB,
-comment se débarrasser de punaises de lit,
-trouver des amis, près de chez vous, des collocs,
-organiser des collectes de jouets, des maraudes,
-financer un projet
-demander des réponses au questionnaire de votre sujet d’étude,
-trouver un stage mal payé,
-poster des jolies photos de la ville, faire découvrir le street art présent dans la ville,
-demander la réparation d’un nid de poule
-partager les activités en cours dans la ville
-lancer une discussion sur un problème dans la ville
-se plaindre des travaux et du prix du stationnement,
-…
Du moment que cela parle de la ville on peut tout écrire. C’est la règle la plus simple, mais comme toute les règles il y a des exceptions.
Car cela ne veut pas dire que l’on va retrouver dans les groupes tout et n’importe quoi. En termes de modération les publications WTF n’ont pas lieu d’être car il y a plein d’autres groupes et pages pour cela. Des très grandes communautés existent aussi comme les groupes de vente et de rencontre. La politique est un sujet possible mais reste un sujet difficile. Lorsque certains membres postent pleins de photos du maire avant les élections ou, à l’opposé, le critiquent systématiquement, c’est une situation pénible pour l’ensemble des membres qui, pour nous, doivent être dans un groupe de confiance. Nous sommes contre ces excès, mais, malgré une volonté de neutralité, il faut aussi pouvoir faire des bilans, des propositions, sur la gestion de la ville.
Pour finir prenons des exemples de gestion de groupes de villes gérés par d’autre, comme par exemple sur les villes d’Evry, Corbeil Essonnes, Ris orangis et Argenteuil. Le ton, la modération et les objectifs y sont différents des groupes que nous avons lancés. A Evry et Argenteuil, la modération est limitée et on a régulièrement des post qui n’ont rien à voir avec la ville (humour, religion, politique internationale). Avec 15000 et 24000 membres ce sont donc deux groupes très intéressants pour s’exprimer mais les membres voient sur leur mur des infos sur leur ville perdues au milieu d’autres qui auraient pu les intéresser, mais qu’ils ne verront jamais car perdus dans la masse. Pour Ris Orangis (4500 membres), c’est une histoire étonnante d’un groupe régulièrement trollé par des politiques. L’admin a cédé sa place après un vote, mais les enjeux et guerres politiques continuent et cela devient pénible. Mais là encore c’est le principal groupe de la ville, il n’y a pas vraiment le choix. A Corbeil (9000 membres), c’est un groupe modéré en amont: les post doivent être d’abord validés par les admins. Ces admin sont proches de la mairie et on se retrouve avec un groupe qui ne me semble pas indépendant. Ce n’est pas une critique car on a un groupe avec une vie tout à fait intéressante, conviviale et pleine d’infos, c’est juste une gestion différente et nous souhaitons des groupes indépendants des mairies. Les groupes sur ces 4 villes sont très largement dominants et à nos yeux il y a de la place pour ceux qui voudraient participer à un groupe de façon différente, c’est pourquoi nous avons décidé d’y lancer des groupes.
En 2011 nous étions différents, en 2019 nous continuons de construire notre projet. Nous allons bientôt soutenir un nouveau projet en France et dans d’autres pays, centré toujours autour des villes mais avec une thématique qui nous tient à cœur depuis des années. Je ne vous la précise pas encore aujourd’hui mais j’espère bien que nos 10 années de travail nous servirons à faire émerger ce projet innovant rapidement.
C. de Prague